A l'occasion de notre belle série consacrée au Mot et le reste que vous pouvez retrouver sur la page dédiée et du premier anniversaire de la sortie chez l'éditeur de la première biographie française de Moondog par Amaury Cornut - dont vous pourrez retrouver la chronique prochainement sur le blog - j'ai le très grand plaisir aujourd'hui de revenir sur la conférence donnée ce jour même par l'auteur dans le cadre de sa série intitulée Moondog à travers le XXe siècle présentée par Murailles Music.
Rennes, le 4bis, 17 h 30. Amaury Cornut bondit littéralement et à pieds joints sur la scène de près d'un mètre de haut qui l'accueille aujourd'hui, inaugurant de façon passionnante et rythmée la 13e édition du Festival Roulement de Tambours qui se déroule jusqu'au 18 avril. Souriant et décontracté, le conférencier nous précise qu'il est possible d'intervenir au cours de la conférence, ce que ne manquera pas de faire Cécile, alias Lou, ma femme, qui m'accompagne, en rappelant à plusieurs reprises l'âge étonnamment et proportionnellement avancé de Moondog au regard de ses idées et expérimentations.
D'entrée l'ambiance est bon enfant, les verres à prix libres, et Amaury, qui adapte à chaque fois sa playlist au lieu de sa conférence, avant d'évoquer « l'existence rennaise de Moondog » lors de son passage mouvementé aux Transmusicales de Rennes en 1988, ne manquera pas d'adresser plusieurs clins d'œil au parterre des organisateurs de l'événement parmi lesquels nous reconnaîtrons Jean-Louis Brossard. Créant dans le même temps un véritable échange avec le public qu'il interroge sur sa connaissance de Moondog, il introduit son propos par le très célèbre Bird's Lament avant d'annoncer qu'il suivra la chronologie en la connectant à des musiciens et thématiques, ce qui « permet de raconter beaucoup d'anecdotes » cadrées par des slides sur grand écran et accompagnées par près de quarante-cinq minutes de musique.
De ses influences premières, de ses rapports à la musique concrète ou traditionnelle ainsi qu'à sa propre musique, en passant par le choix de vivre dans les rues, spécialement celles de New York, jusqu'à son voyage en Europe et à sa mort, Amaury Cornut présente et élabore avec gourmandise ce « millefeuille d'anecdotes qui vont construire la vie de Moondog ». Ce parti pris aussi riche que pertinent nous permet ainsi d'approcher de multiples aspects de la vie et de l'œuvre de Moondog, des jams à l'élaboration de ses compositions, interprétations, sonorités et instruments et même de son nom, sans oublier cette « facette mégalo brillante et touchante » qui caractérise l'ensemble.
D'entrée l'ambiance est bon enfant, les verres à prix libres, et Amaury, qui adapte à chaque fois sa playlist au lieu de sa conférence, avant d'évoquer « l'existence rennaise de Moondog » lors de son passage mouvementé aux Transmusicales de Rennes en 1988, ne manquera pas d'adresser plusieurs clins d'œil au parterre des organisateurs de l'événement parmi lesquels nous reconnaîtrons Jean-Louis Brossard. Créant dans le même temps un véritable échange avec le public qu'il interroge sur sa connaissance de Moondog, il introduit son propos par le très célèbre Bird's Lament avant d'annoncer qu'il suivra la chronologie en la connectant à des musiciens et thématiques, ce qui « permet de raconter beaucoup d'anecdotes » cadrées par des slides sur grand écran et accompagnées par près de quarante-cinq minutes de musique.
De ses influences premières, de ses rapports à la musique concrète ou traditionnelle ainsi qu'à sa propre musique, en passant par le choix de vivre dans les rues, spécialement celles de New York, jusqu'à son voyage en Europe et à sa mort, Amaury Cornut présente et élabore avec gourmandise ce « millefeuille d'anecdotes qui vont construire la vie de Moondog ». Ce parti pris aussi riche que pertinent nous permet ainsi d'approcher de multiples aspects de la vie et de l'œuvre de Moondog, des jams à l'élaboration de ses compositions, interprétations, sonorités et instruments et même de son nom, sans oublier cette « facette mégalo brillante et touchante » qui caractérise l'ensemble.
Il nous permet également de découvrir et de mesurer les difficiles conditions d'existence, ponctuées de déboires et coups de chance, de cet artiste aveugle qui, composant en permanence tout au long de sa vie, avait fait le choix de continuer à payer des copistes pour retranscrire son œuvre plutôt que de se payer un toit. Un artiste trop peu connu au regard de son œuvre, à la fois « trop savant pour les gens qui écoutent de la pop, trop pop pour les gens qui écoutent de la musique savante », ce qui explique peut-être qu'on n'en trouve étonnamment aucune référence dans Les Musiques Savantes Tome I et Tome II de Guillaume Kosmicki (qui peut-être saura davantage éclairer ce choix) et accentue l'importance du travail de recherche et de reconnaissance colossal réalisé autour de cette œuvre monumentale par Amaury Cornut.
Avec à la fois passion, ambition et humilité, Amaury propose ainsi une conférence pleine d'intelligence et de sensibilité, où l'on se sent comme chez soi, entre amis, tutoyés par un conférencier tout à la fois accessible, sympathique et aguerri qui nous passe ses morceaux fétiches en mangeant des galettes Saint-Michel et qui, partageant ses anecdotes, drôles ou touchantes, nous confie avoir parfois « l'impression de raconter une blague de famille ». « Pas musicologue mais passionné », Amaury, après avoir sollicité un ami, nous fait néanmoins une démonstration chantée et réussie de ce rythme à cinq temps si caractéristique de la musique de Moondog. D'ailleurs, même considéré comme « compositeur pour compositeurs », Moondog « inspire par son aura, son charisme de créateur » plutôt que directement par sa musique, relativement peu reprise au regard de son étendue : « si s'inspirer de Moondog revenait à faire du Moondog, ce serait impossible ».
Ainsi Amaury Cornut travaille-t-il depuis six ans sur cette « œuvre-monde » qui n'appartient à aucun genre. Au cours de ses recherches il a accumulé et continue d'accumuler les matériaux les plus divers et les plus inédits dont il nous présente ici un aperçu, comme cette photo « cramée, dégueulasse mais que vous ne verrez pas sur internet tous les jours » ou encore celle d'un « Moondog version 3.0 » habillé de pied et de cape, littéralement, coiffé d'un casque de Viking avant sa conquête de l'Europe et qu'il commente ainsi en souriant : « N'utilisez pas de photos de Moondog, ça pète toute la conférence ».
« A la base je suis censé parler de Moondog et non de moi », ce à quoi j'espère remédier un peu ici — et puis un peu plus prochainement à l'occasion de la chronique du Moondog — au regard le mérite et le travail accompli. Par un juste retour des choses c'est peu dire que la répétition et la fascination qui marquent la vie et l'œuvre de Moondog se retrouvent chez ceux qui l'ont côtoyé, de près ou de loin, hier ou aujourd'hui. De l'histoire de cette étudiante qui lâcha tout pour se consacrer à lui à l'instar d'Amaury Cornut qui, parce que cela « ne pouvait se passer que comme ça », a effectué un formidable travail de retour aux sources par l'écoute intensive et les rencontres (« Moi, petit bonhomme de vingt ans, me retrouver avec ces moondoguiens, en train de prendre des notes comme un malade ! ») jusqu'à parvenir a faire venir Paul Jordan en France, lui qui avait fait venir Moondog à l'époque, faire se rencontrer pour la première fois les musiciens de Moondog Dominique Ponty et Stefan Lakatos, ou encore numériser « six kilos de partition » pour les numériser et les offrir à des écoles de musique.
Amaury, de son propre aveu, en plus d'être passionné, est prolixe et c'est tant mieux. Aussi les quarante-cinq minutes de musique présentes au programme seront-elles souvent interrompues, à son grand dam, ou pas : « C'est honteux mais quand même c'est sympa, d'autant que je respecte un peu le bonhomme comme vous avez pu le remarquer », ponctuant puis terminant sa conférence par une discographie, suivant le cheminement de son livre auquel l'événement fait écho sans s'y substituer tant les matériaux regroupés sont vastes et variées, qui s'étoffent au gré des inlassables, continuelles, obsessionnelles, recherches d'Amaury sur Moondog. Un artiste toujours plein de surprise qu'il est « génial de découvrir et de faire découvrir » et dans l'univers duquel « tout le monde peut entrer par un biais différent ».
Communicatif par sa passion, son enthousiasme et son allant, Amaury Cornut nous offre ainsi une conférence équilibrée, faisant le pont entre ses propres recherches, celles de Moondog, la vie de celui-ci et son écoute. Une conférence vivante et complète, qui regorge de références à la vie, à la musique (de Moondog aux autres, de la théorie à l'histoire de la musique), à l'époque (qui s'étend donc à tout le XXe siècle), mais aussi à la littérature (avec notamment la Beat Generation). En plus de sa prestation, nous devons à Amaury la découverte de son album fétiche, A New Sound of an old instrument ou encore Organ Rounds, des extraits de ses premiers 78 tours et de sa symphonie celtique interrompue aux Transmusicales de Rennes.
Pour toutes ces raisons nous tenons à remercier Amaury Cornut pour cette conférence et les autres, pour l'accueil et la dédicace, pour le travail accompli depuis six années consécutives, le partage de sa passion, de sa documentation, des partitions, pour son site de référence et son activité sur les réseaux, pour son livre dont je vous parlerai bientôt, pour la création du label Drone Sweet Drone Records avec Alexis Degrenier, percussionniste de Minisym, pour celle enfin du groupe Minisym « destiné à jouer la musique de Moondog » que nous retrouverons notamment près de Rennes le 10 juillet dans le cadre d'un autre festival, celui des Tombées de la Nuit. Un grand merci également au Mot et le Reste et à Murailles Music qui participent à la diffusion de ce travail remarquable.
Les prochaines conférences, toujours changeantes, gratuites mais sur réservation, et auxquelles je vous invite très vivement à assister pour la forme comme pour le fond, se dérouleront le 16 avril à Rouen, le 17 à Creil, le 18 à Vincennes, le 30 à Lyon et le 23 mai à Challans.
Il ne me reste qu'à vous souhaiter ainsi qu'à Amaury bonnes conférences, bonnes écoutes et de bonnes lectures à tous en attendant de vous retrouver avec les Musiques savantes de Guillaume Kosmicki, toujours au Mot et le Reste, et auparavant, à mille lieues de là, avec la suite du cycle des Contrées intitulée les Barbares.
Crédit photo © Amaury Cornut, Le Mot et le Reste, Murailles Music & Eric Darsan
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